Théâtre: Gaspard de Peter Handke

Hier soir, je suis allée voir la pièce de théâtre Gaspard, de Peter Handke, l'histoire d'un jeune homme qui vécut enfermé dans une pièce sombre jusqu'à ses 17 ans. C'est une pièce contemporaine et la mise en scéne était pour le moins original.

Dans la pièce d'origine, il n'y a qu'un acteur et trois voix off. Les voix off ont été remplacé par trois acteurs afin de donner plus de visuel. La pièce est ensuite un réflexion sur le langage et la façon dont il structure la pensée et notre vision du monde. Parfois, on se sent mal à l'aise car le personnage central devient comme fou lorsqu'il découvre ce qu'il peut faire avec le langage et le pouvoir qu'il développe sur le monde qui l'entoure.

La pièce a été interprétée avec beaucoup de rythme. On se laisse porter par les intonations, par les monologues qui se superposent de sort que la musique des mots ressort du texte. Il n'y a pas de dialogue; la pièce est une suite de monologues des personnages. Les phrases sont tournées dans tous les sens avec rigueur, les mots décortiqués, les respirations déplacées le long de la phrase. En voyant la pièce, je n'ai pu m'empêcher de penser aux Exercices de style de R. Queneau. J'ai trouvé que c'était une façon similaire de tourner les mots dans tous les sens. Chez Queneau, on part d'une histoire et différentes façons de la raconter sont expérimentées. Chez Handke, on part d'une phrase et elle est bousculée, ciselée et mélangée.

Connaissant un peu l'improvisation, en effet, on change radicalement de registre avec ce style de théatre dit "de recherche". En impro, il faut se lâcher, ne pas trop réfléchir à ce que l'on dit ou fait, tout en sachant où l'on veut aller mais en s'adaptant au jeu de l'autre. Ici, on analyse chaque phrase, chaque mot pour en découvrir tous les sens possibles et les liens avec les autres mots de la phrase, les différentes phrases obtenues en changeant seulement un mot de la phrase, voire la place d'un mot dans la phrase.

Ce n'est pas un théâtre d'accès facile, mais à voir au moins une fois dans sa vie car ça en vaut le détour. On est interloqué par le jeu des acteurs, mais ça amène le spectateur à réfléchir, ce qui est, en soi, déjà pas mal.